Petite ballade du côté des serres de la Tête d’Or entre bota-geeks. L’occasion pour moi de prendre quelques clichés d’une fougère, repérée le mois dernier, qui m’a tout de suite subjugué par sa structure bien particulière.
Platycerium est un genre de fougère tropicale regroupant une dizaine d’espèces. « Platys » signifie large et « Keras » corne. Son nom commun, tout aussi évocateur, est lui plus facile à retenir: on l’appelle « cornes de cerf », vu la ressemblance de ses frondes (= feuilles des fougères*) avec des bois de cervidé punk. Ces plantes sont dites « épiphytes », c’est-à-dire qu’elles ne poussent pas au sol mais se fixent sur d’autres plantes sans toutefois les parasiter, l’hôte faisant office de support.
Mais il y a autre chose de bien singulier. L’avez-vous remarqué?…
Bien vu (sinon retour à la case observation)! Effectivement notre fougère possède deux types de feuilles*:
– Les plus visibles, qui lui valent son nom, assurent la photosynthèse (d’où la couleur verte des « cornes ») ainsi que la reproduction (les fougères n’ont pas de fleurs ni de graines mais se multiplient par des spores. Vous avez sans doute déjà vu, en vous baladant en forêt, ces croutes/pustules orangeâtes sous les feuilles, qui ne sont autre que des petits « sacs » de spores ([hahaha, sac de sport. Hum… ok je sor(e)s]).
– Les autres frondes, en forme d’applique murale, sont stériles et finissent par brunir (mais ne sont pas mortes pour autant) et se superposer pour former une sorte de mille-feuille. A quoi cela peut-il bien servir?
C’est là que ça devient vraiment passionnant : ce demi-cornet, plaqué au support, permet de recueillir les débris végétaux qui tombent d’en haut (rappelons que nous sommes en forêt tropicale). Ceux-ci finissent par se décomposer et former de l’humus!
Génial non? Plutôt que de choisir entre pousser au sol, avec de la bonne terre mais pas de lumière ou plus haut, dans la canopée, à la lumière mais sans terre ; madame la fougère décide d’avoir le beurre et l’argent du beurre: De la lumière et de l’humus!
Magnifique stratégie évolutive!
On voit ici quelques étapes de la croissance de la plante. En 1) la feuille stérile (a) apparaît, se développe (en 2), toujours verte) et finit par brunir en 3). Une nouvelle fronde apparait alors (c) pour recouvrir la première, et ainsi de suite. (b) représente les frondes fertiles, les « cornes » de notre Platycerium…
Avis aux Lyonnais: cette étonnante fougère se trouve dans les petites serres à l’entrée sud du parc de la Tête d’Or… Aux amateurs de plantes vertes: Platycerium se plait apparemment bien en appartement…